vendredi 26 février 2010

Tintamarre. Sous les bourrasques, les arbres font le dos rond et la pluie crache en rafales aux flancs des murs. Bruits métalliques… Dans la forêt de mâts, le concert bat son plein.
Clac ! Un cordage. Rompu d’un coup, sans bavure, tout net.

aller simple
l’ami* de toujours
lune décroissante

La mer vocifère. S'engouffrent dans la pinède les longs mugissements du vent. La voix du monde. Enorme. Parfois secouée de hoquets, de sanglots rouges coincés dans le goulet du temps.
Pfuit ! Feux follets en maraude échappés des marais.

danse du diable
guiseppe l’invite
pour la dernière valse

Un avion trop bas siffle. Et puis un long point d’orgue. Là-bas on s’apprête…
Nouvel abat-d’eau. Un djinn traverse. Ses yeux bleus aveugles.

chute de perles
des chapelets de nuages
changent de rive

Inspiration profonde. Soulèvement. Suspension. Fracas. La digue côté Nord… Son gros trou creusé par les vagues. Ses tripes.

un doigt
sur la table d’orientation
ongle noir

Le quai luit. Une mouette s’attarde sur deux pavés disjoints. Des pas. Son cri. Disparaît.
Aux terrasses, les chaises empilées. Le barbu n’a plus sa pipe. Plié, son journal.

le cadran
une aiguille en moins
compte à rebours

Elle court seule, la cannette de bière, jusqu’à l’anneau d’ancrage.

le Roi Soleil
aux portes de la ville
sa face craquée

Tourbillon de gravats. La pointe des cyprès fouette au ciel une trouée.


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* L'ami : Décédé d'une crise cardiaque. J'écris ces lignes pendant que ses obsèques ont lieu. La tempête fait rage.
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11 commentaires:

  1. Je pense qu'il faut arriver à discipliner ses pensées...acte encore difficile pour moi.
    Cette poésie est belle, j'aime sa relation avec les saisons.
    bravo.

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  2. Merci Evelyne, de cette première visite et de ton compliment.

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  3. Je vois qu'en effet, tu n'en as pas perdu une miette de ce vent devenu tempête ! Tout un haïbun en est sorti... On se croirait au beau milieu d'un conte fantastique !

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  4. quelle belle écriture ramassée...

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  5. Merci monika, Evelyne ! Vous m'encouragez. Je n'en suis qu'aux balbutiements par rapport à l'écriture du haïbun...
    D'accord, monika, pour l'ambiance fantastique. C'est comme ça dans ma tête.

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  6. 26 février. Ce matin, ses obsèques.

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  7. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  8. J'aime beaucoup ce lâcher, cette spontanéité entre les éléments déchaînés et la narration. Continue...

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  9. Beau et fort ce haïbun: surtout ne pas se retenir...

    André

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  10. Excellent Danièle, des mots pris dans la tempête,
    mais libres et maitrisés, c'est fort, continue ça fait du bien...

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  11. Heureuse d'avoir vos appréciations neko, André, mido. Elles me sont précieuses.

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