mercredi 31 octobre 2012





feuilles sur les feuilles
les souvenirs 
s'amoncellent


la moitié des Français
trop pauvre pour se chauffer
pleine lune



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mardi 30 octobre 2012

Heure d'hiver



heure d'hiver
la lumière matinale
sur la pendule


vent froid
sortant du cimetière
je referme la porte


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dimanche 28 octobre 2012

Shikoku Muchujin-Shikoku Haïku Méguri “Balade – Haïku dans l’île de Shikoku” (28)

SHIKOKU : Derniers jours

 

25 SEPTEMBRE



Ritsurin Koen

 



 Photo Gotani



Le parc Ritsurin (Ritsurin Koen) situé à Takamatsu, est un des plus beaux du Japon. Il a été construit en 1625. Couvrant une superficie de 75 hectares, il offre une magnifique promenade autour d'une pièce d'eau centrale. 





Ses plantations de pins noirs (Kuromatsu), aux troncs tortueux si particuliers et à la taille si élégante, font partie des curiosités offertes au public.


ronde des pigeons  
sous les kuromatsu
soleil vertical




Le parc est adossé au Mont Shiun-zan. Plusieurs collines et plans d'eau contribuent à créer l'harmonie générale et une ambiance zen. 


 La maison de thé



bruit de la cascade
les visiteurs silencieux
au salon de thé









les hagi fleuris
sur les flots teintés de rose
une barque glisse

hagi : arbre du Japon à floraison automnale 






attente patiente 
sous les fleurs de nénuphars
parfois un remous






Au passage des promeneurs, une multitude de carpes coi se précipite sous les ponts pour réclamer pitance. Bien m'en a pris de vouloir leur être agréable !


la bouche des carpes
ma caméra fracassée
pour un bout de pain


(...)


La journée du 25 septembre est encore bien remplie car Mme Miyabi Yukawa, professeur de haïku, membre de Hototogisu, disciple de Takahama Kyoshi, nous offre plusieurs activités autour du petit poème. Après le ginko (balade haïku) du matin, nous participons à une lecture de haïkus en français, anglais (traduction par M. Chris McCabe, Coordinateur des relations et affaires internationales de la préfecture de Kagawa) et japonais. L'après-midi, c'est à un tensaku (réécriture de haïkus selon les conseils d'un maître) que nous sommes conviés. Comment écrire des haïkus ? Mme Yukawa  insiste sur la nécessité de mobiliser tous ses sens afin de se placer dans le processus de création du haïku. Elle nous parle de ses méthodes d'écriture personnelles.



Mme Yukawa à gauche, Chris San à droite (Photo Gotani)



Nous dégustons entre temps le macha pour lequel le thé vert est moulu très fin. Il est accompagné du petit gâteau traditionnel, toujours très délicat.


Photo Gotani



goûtant le macha
je cherche un mot de saison
un coup d'éventail




Parlant d'éventail, une très belle exposition est visible dans le musée d'art et traditions populaires de Mitsuri Koen. La forme des éventails varie selon l'usage et l'époque.






Les plus anciens sont arrondis (Uchiwa) et ne sont pas pliants comme plus tard les Ôgi. Leur surface, décorée de différentes manières, peinture, calligraphie, poème...  permettait de joindre le raffinement à l'utilitaire.
Il en existait qui servaient aux hommes à déclarer leur flamme, certains étaient réservés aux guerriers, d'autres permettaient d'activer les braises...
Leur appellation varie selon leur  destination précise.









Le musée présente aussi des poteries et des objets traditionnels en usage autrefois au Japon. De magnifiques kakemono (peinture ou calligraphie sur soie) ornent le vaste espace d'exposition.



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Soirée au restaurant Nicho, "Les deux papillons", à Takamatsu



La cuisine et le lieu, une ancienne maison de geishas, sont magnifiques.




Photos Gotani

Cuisine traditionnelle raffinée (kaiseki ryôri), typique de la région de Sanuki (ancien nom de la province de Kagawa). Plaisir des yeux et des papilles...

http://www.2chou.jp/




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26 SEPTEMBRE

 

  Visite matinale à la préfecture de Kagawa où nous sommes reçus par M. Tenkumo, vice-préfet de Kagawa.



 Photo Gotani

 Panorama de Takamatsu 
depuis les fenêtres de la préfecture 



La soirée de clôture se déroule à topia-kagawa, la salle de congrès de Takamatsu. Elle est marquée par la conférence de presse en première partie. 





Après la présentation générale au public du projet "Balade-haïku à Shikoku" par les organisatrices, Mme Osaki, présidente de l'association Shikoku Muchujin et Mme Gotani, présidente de l'association Japon-Auvergne Nippon-Auvergne (JANA) de Clermont-Ferrand, chaque participant au voyage à Shikoku commente une partie du programme en s'appuyant sur son blog et les photos sélectionnées. 

Puis, M. Oshita, directeur du centre de management culturel de Mitshubishi UFJ de Tokyo, donne une conférence intitulée « La culture japonaise et l’emploi du kigo dans le haïku ». 



Conférence de M. Oshita 
traduite par M. Chris McCabe


Définissant le kigo (mot de saison) comme la véritable mémoire des Japonais, puisque chaque époque crée de nouveaux kigos, M. Oshita pointe l’importance du recours à l’allusion  et au mot de saison en tant que caractéristiques essentielles de la culture japonaise. Il rappelle que, pour Basho, le kigo était primordial.



La manifestation s'achève par un repas amical réunissant de nombreux acteurs de cette belle aventure à Shikoku. M. Noguchi est heureux de créer, une dernière fois pour nous, des calligraphies illustrant quelques-uns de nos haïkus.

mercredi 24 octobre 2012

Shikoku Muchujin-Shikoku Haïku Méguri “Balade – Haïku dans l’île de Shikoku” (27)

SHIKOKU : 24 SEPTEMBRE




Takamatsu wagasa 
fabrique d'ombrelles de Takamatsu 




 
tièdeur matinale
Shodo de plus en plus loin
reviendrai-je un jour ? 



Dès le matin, nous reprenons le ferry pour Takamatsu où nous attend la visite du magasin et fabrique d'ombrelles (Takamatsu wagasa) tenu par M. et Mme Miyoshi.
C'est un plaisir d'assister à la métamorphose des éléments, depuis le façonnage du squelette en bambou de l'ombrelle jusqu'au coiffage en papier japon finement décoré.


M. Miyoshi au travail




 
balade automnale
quelques ombrelles tournoient
pour un pas de danse*


* Les ombrelles sont très utilisées dans les danses japonaises traditionnelles.


Bien sûr, nous nous faisons encore gâter : carnet de tanka et tanka joliment illustré par Mme Miyoshi.




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Travail de la laque





L'artisanat traditionnel est vraiment très riche à Shikoku. Après les ombrelles, vient la découverte de l'atelier de laque de la famille Goto (Goto-nuriti).

La laque (Urushi) est recueillie à partir d'une incision pratiquée dans l'écorce de l'arbre nommé laquier. Plusieurs années sont nécessaires à l'obtention de quelques grammes de la précieuse sève.

Le laquage relève d'un art ancestral. La famille Goto s'y applique depuis cinq générations et la sixième ne devrait pas tarder à prendre la relève...



 la laque étalée
elle dit que c'est pour novembre
parfum de thé vert




 Démonstration de Mme Goto
Laque rouge (Shu Nuri)
étalée à l'aide d'une spatule (Hera)



Après polissage de l'objet à laquer, qui peut être en bois, en terre ou autre matériau, deux couches grossières de laque sont étendues et polies à leur tour. Le laquage proprement dit, minutieux travail exigeant la superposition de fines couches, jusqu'à vingt, peut alors commencer. Entre chaque couche, un séchage s'impose.
Le ponçage et le polissage de la dernière couche sont suivis de la décoration, la couleur de la peinture étant obtenue à partir de pigments végétaux.







Tous ces objets sont précieux, certains d'entre eux ont été fabriqués par l'ancêtre de la famille Goto.




La visite se termine par une dégustation de thé dans des gobelets laqués, comme il convient !


Crédit photo : Tetsuya Gotani

NB. De retour à l'hôtel, je récupère mon appareil photo égaré deux jours plus tôt. 

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samedi 20 octobre 2012

Shikoku Muchujin-Shikoku Haïku Méguri “Balade – Haïku dans l’île de Shikoku” (26)


SHIKOKU : 23 SEPTEMBRE



L'île de Hosaï : Shodoshima 
(île de Shodo, nord-est de Takamatsu)
 



Photo Gotani



sans que je m’en aperçoive
un chien m’a suivi
jusqu'à la plage

Ozaki HOSAÏ (1885-1926)
(Tr. Cheng Wing fun & Hervé Collet)



Il ne manquait plus que ce cher Hosaï au programme ! Voilà qui sera chose faite aujourd'hui.
Dès 8h30 du matin, après un petit déjeuner frugal, nous roulons vers l'embarcadère de Takamatsu pour prendre un ferry en partance pour l'île de Shodo située dans la Mer intérieure de Seto.
Au port, nous retrouvons M. Masazumi Noguchi qui a préparé la journée et qui doit nous guider.
Pendant la traversée, d'environ une heure, nous restons en cabine à l'écouter commenter longuement des documentations sur Shodoshima, île au relief très marqué, au climat d'une grande douceur qui favorise la croissance des citronniers et des oliviers. Shodoshima est aussi l'île aux huit temples, l'île aux 91 stèles haïku et l'île du poète Hosaï.




Stèles en l'honneur de Hosaï (Photo Gotani)


Dès notre arrivée, nous sommes conduits dans le Parc des Olives où se dressent les stèles de remerciement à Hosaï venu s'installer sur l'île en 1925, alors qu'il ne lui restait que quelques mois à vivre.



Stèle de la chanson des olives (Photo Gotani)


Puis, M. Noguchi et son accompagnatrice, une de ses anciennes élèves car M. Noguchi a enseigné à Shodoshima il y a cinquante ans, entonnent pour nous la très belle chanson des olives dont les paroles sont gravées sur la stèle ci-dessus.


premiers pas sur l'île
pour accueillir les Français
le chant de olives

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 Statues pour la paix (Photo Gotani)


Tout près, a été érigé ce monument montrant une institutrice entourée des seuls douze élèves du village. La guerre qui s'abat bientôt n'épargnera aucun de ces jeunes-gens. Il est fait ici allusion au roman de Nijushi no Hitomi (années 30), adapté à l'écran en 1955, par le réalisateur Keisuke Kinoshita, sous le titre 24 prunelles. Ce film, qui rencontra un très grand succès, constitue un véritable hymne à la paix.


printemps de leur vie
le dernier des survivants
a les yeux brûlés



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 Musée Hosaï au temple Saïko 
de Shodo



Musée Hosaï (Photo Gotani)



Minango an
dans la rivière de sel
pissant sur le crabe

(haïku composé d'après un dessin amusant présenté dans la vitrine)



Nous avons le bonheur de découvrir le musée Hosaï, qui n'est autre que la maison, ou ermitage (Minango an) du poète. Ce dernier a été détruit une première fois par un typhon. Reconstruit, il a subi alors l'assaut des termites. Il a été finalement rebâti il y a dix-huit ans, à l'identique du premier. 
Le maire en personne, M. Okada nous accueille.
Deux poètes représentant les deux tendances du haïku, libre et classique, M. Yasuyoshi INOUÉ et M. Shôsétsu YAMAMOTO ("Reflet de la neige") sont également présents.




 Photo Gotani

La documentation, textes, photographies, objets est ici très nombreuse, évoquant l'enfance et la vie de celui qui vécut toujours accompagné d'un sentiment de profonde solitude. Ne s'est-il jamais remis de la mort violente de sa mère alors qu'il n'était âgé que de huit ans ? Ou bien ses amours contrariées de jeune homme demeurèrent-elles un éternel objet de souffrance ?

 Photo Gotani

Pour gagner sa vie, Hosaï vendait des bougies aux pèlerins. Il est décédé en 1926, seulement âgé de 40 ans, dans l'alcôve contigüe à la pièce où nous sommes reçus.


nuit de lune et de vent
tout seul
je tousse

(Tr. Cheng Wing fun & Hervé Collet)


Nous recevons de nombreux cadeaux dont la copie d'une lettre écrite de la main d'Hosaï au moine qui l'a bien accueilli au temple Saiko et une affiche du haïku ci-dessus


Photo Gotani



Après une courte grimpette, nous atteignons le petit cimetière où repose Hosaï.


 Tombe de Hosaï (Photo Gotani)



sake*
sur la tombe de Hosaï
ciel de pluie



*Les femmes japonaises ne diraient pas "sake" (langage viril) mais "ôsaké", c'est plus correct.



 Photo Gotani

A l'instar de Santoka, nous versons quelques gouttes de sake sur la tombe du poète, en guise d'hommage.



fleurs de chrysanthèmes
du fond du cimetière
le son de la cloche





  Stèles de Santoka et de Hosaï à Saïkoji (Photo Gotani)


Saïkoji
sur les stèles des poètes
feuilles de ginkgo


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Arrêt dégustation


Somen (Photo Gotani)

En route, nous effectuons une courte pause pour déguster des Somen, nouilles fines à base de farine de blé fabriquées à la main, de manière artisanale et accompagnées de thé vert. Ce plat se  savoure généralement froid,  surtout en été.

Higanbana ou Manjushage*

Au Japon, la coutume veut qu'en cette période de l'année l'esprit des morts rejoigne la maison familiale. Il est de tradition de l'honorer avec de jolies fleurs rouges nommées Higanbana ou Manjushage. Ces fleurs s'épanouissent à peu près au moment de l'équinoxe d'automne (Higan signifie "équinoxe d'automne"), c'est pourquoi elles sont liées à la mort. Un bouquet a été placé devant l'auberge où nous prenons notre collation.


Théâtre de plein air, Nakayama Noson Kabuki


Nous nous installons pour le pique-nique devant le théâtre de plein air. Il fait très chaud, je m'éloigne vers l'ombre et découvre à proximité une rizière.




sueur sur mon front
à l'orée de la rizière
la fleur d'équinoxe*

* Higanbana


*Cette fleur porte de nombreux noms liés à la mort :
 
- "manjushage (曼珠沙華) : nom beaucoup plus littéraire et moins utilisé
- shibito bana (fleur des morts)
- tengai bana (fleur de l'au-delà)
- yuuri bana (fleur des fantômes)
- sugeto bana (fleur orpheline)
- Lycoris radiata (nom latin)
- red spider lily (en anglais)
- amaryllis (dans la plupart des traductions)".


(Extrait du blog : http://www.nautiljon.com/culture/flore-17/higanbana+%28ou+higan+bana%29-51.html).
 
"Cette fleur, dont les tons vont du rose pourpre foncé au rouge cramoisi, les Japonais la nomment manjushage (nom dont la traduction est difficile à établir puisqu’il se compose de quatre kanji, littéralement : fleur, sable, joyau, magnifique)."

Extrait du site :  http://www.beyondfragment.net/1-accueil/2-reflexions/1-noms/13-lycoris.html.


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Shodoshima est réputée pour ses plantations d'olives. En surplomb de la mer, Olive koen ("Parc de l'olive") s'étend sur plusieurs hectares. Nous le visitons longuement. Chaque variété d'olive est commentée ainsi que sa saveur et son mode de dégustation.

 Olive Kôén


 Moulin sur la colline de "Olive Kôén"


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Il reste à faire une dernière grande découverte : la forêt de stèles (Kuhi no mori). Quatre-vingt-onze stèles gravées de haïkus ont été dressés sur une colline en sous-bois.


Kuhi no mori (Photo Gotani)



Kuki no mori
au bout du sentier de feuilles
 les mots des poètes



La découverte, grâce à M. Noguchi et M. Onishi, est merveilleuse. M. Noguchi déchiffre pour nous ce très beau haïku :

le silence
des arbres en hiver
l'amour d'un père

MIZUHARA Shuôshi



La journée se termine. Nous empruntons le plateau de Utsukushi-no-hara qui offre de superbes échappées sur les gorges de Kanka.




lumière du soir
apercevant l'archipel
nous croisons des singes


Avant de nous quitter, M. Noguchi nous dédicace Rengyonoshima, son livre sur Shodoshima où nous restons pour la nuit.


nuit de fin d'été
des étoiles dans les yeux
le poète signe 


Par bonheur, et grâce à la perspicacité de Maïko Gotani que je remercie fort, mon appareil photo a été retrouvé dans l'autobus. 

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